Page:Sand - Andre.djvu/174

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— Écoutez, dit-il : si vous restez à m’attendre, vous souffrirez trop. Venez avec moi.

— Oui ! s’écria Geneviève ; mais comment faire ?

— Montez en croupe derrière moi. Il fait une nuit du diable : personne ne nous verra. Je vous laisserai dans la métairie la plus voisine du château ; je courrai m’informer de ce qui se passe, et vous le saurez au bout d’un quart d’heure, soit que j’accoure vous le dire et que je retourne vite auprès d’André, soit que je le trouve assez bien pour le quitter et vous ramener avant le jour.

— Oui, oui, mon bon Joseph ! s’écria Geneviève.

— Eh, bien ! dépêchons-nous, dit Joseph ; car j’attends Henriette d’un moment à l’autre, et, si elle nous voit partir ensemble, elle nous tourmentera pour venir avec nous, ou elle me fera quelque scène de jalousie absurde.

— Partons, partons vite, dit Geneviève.

Joseph plia son manteau et l’attacha derrière sa selle pour faire un siège à Geneviève. Puis il la prit dans ses bras et l’assit avec soin sur la croupe de son cheval ; ensuite il monta adroitement sans la déranger, et piquant des deux, il gagna la campagne ; mais, en traversant une petite place, son malheur le força de passer sous un des six réverbères dont la ville est éclairée ; le rayon tombant d’aplomb sur son visage, il fut reconnu d’Henriette, qui venait droit à lui. Soit qu’il craignît de perdre en explications un temps précieux, soit qu’il se fît un malin plaisir