Page:Sand - Andre.djvu/274

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En effet, pendant ce dernier mois, Geneviève ne souffrit plus : elle n’avait pas la force de quitter son fauteuil ; mais elle lisait l’Écriture sainte ou se faisait apporter des fleurs dont elle parsemait sa table. Elle passait des heures entières à les contempler d’un air heureux, et personne ne pouvait deviner à quoi elle songeait dans ces moments-là. Geneviève souffrait de se voir entourée et surveillée ; elle demandait en grâce à être seule ; alors il lui semblait qu’elle rêvait ou priait plus librement ; elle regardait doucement le ciel et ses fleurs, puis elle se penchait vers elles et leur parlait à demi-voix d’une manière étrange et enfantine. « Vous savez que je vous aime, leur disait-elle ; j’ai un secret à vous dire : c’est que je vous ai toujours préférées à tout. Pendant longtemps je n’ai vécu que pour vous ; j’ai aimé André à cause de vous, parce qu’il me semblait pur et beau comme vous. Quand j’ai souffert par lui, je me suis reportée vers vous ; je vous ai demandé de me consoler, et vous l’avez fait bien souvent ; car vous me connaissez, vous avez un langage, et je vous comprends. Nous sommes sœurs. Ma mère m’a souvent dit que, quand elle était enceinte de moi, elle ne rêvait que de fleurs, et que, quand je suis née, elle m’a fait mettre dans un berceau semé de feuilles de roses. Quand je serai morte, j’espère qu’André en répandra encore sur moi, et qu’il vous portera tous les jours sur mon tombeau, ô mes chères amies ! »