— Ah ! mon Dieu ! Comment le savez-vous ?
— J’ai entendu quelques mots, et j’ai deviné le reste. Pourquoi l’avoir cassée, cette pauvre fleur ? Ne pouviez-vous me la demander ? ne pouviez-vous attendre à demain ? Je comptais vous la donner.
— Mais… si je ne l’ai pas fait exprès ?
— Vous ne l’avez pas fait exprès ?
Julie sentit qu’elle rougissait, car Antoine l’examinait attentivement, et il y avait de l’ironie moitié amère, moitié tendre dans ses petits yeux noirs.
— Eh bien, vrai, reprit-elle espérant se sauver par un expédient jésuitique, c’est contre mon gré que ce malheur est arrivé !
— À la bonne heure, répondit Antoine, qui l’examinait toujours, dites comme ça, j’aime mieux ça.
— Vous aimez mieux ça… que quoi ?
— Oui, mordié ! Voyons, abandonnez la mauvaise cause que vous voulez plaider ; condamnez franchement la sottise et la déloyauté de maître Julien ; laissez-moi le punir comme je l’entendrai…
— Mais où prenez-vous que maître Julien… ?
— Ah ! n’essayez plus de mentir, s’écria M. Antoine en se levant par un bondissement de tout son petit être irritable et passionné ; ça ne vous va pas de mentir, vous ne savez pas ! Et puis c’est inutile, je vous dis que j’ai entendu, et, comme je ne suis pas un imbécile, j’ai conclu… Julien vous trouve à son gré, et le drôle voudrait bien vous en conter, s’il osait !
— Monsieur Thierry ! que dites-vous là ?