Page:Sand - Antonia.djvu/259

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

madame d’Estrelle : j’avais là-dessus des idées que mon devoir est encore de lui soumettre ; mais sachez bien que, si elle ne juge pas à propos de s’y rendre, je ne lui rappellerai jamais que sa résistance peut me nuire dans votre esprit, que je n’agirai jamais avec elle sous l’impression de mon intérêt personnel, et qu’enfin, si madame persiste, ainsi que Julien, dans le projet qu’ils ont de se marier, je les aiderai de mes conseils, de mes services, et leur serai éternellement ami, parent et serviteur.

Julie tendit silencieusement la main au procureur. Des larmes vinrent au bord de ses paupières. Elle regarda Antoine et vit son inébranlable obstination sur son masque racorni et cuivré.

— Allons trouver madame Thierry et Julien, dit-elle en se levant ; c’est à eux qu’il appartient de prononcer.

— Non pas ! s’écria M. Antoine ; je ne veux pas qu’on prenne les gens au dépourvu. Dans le premier moment, je sais fort bien que le peintre fera son grand homme et que la mère prendra ses grands airs, surtout en ma présence. Et puis on se piquera d’honneur devant madame, on ne voudra pas être en reste de fierté : sauf à s’en repentir l’heure d’après, on dira vitement comme elle ; mais j’attends tout le monde à demain matin, moi ! Je reviendrai. Porte-leur mon dernier mot, procureur ; fais tes réflexions aussi, mon bel ami, et nous verrons alors si vous serez bien d’accord tous les quatre pour refuser mes dons pré-