Page:Sand - Antonia.djvu/342

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avec aplomb le français aussi bien que le latin. Ce manuscrit de sa façon, qui commençait par mesdames et messieurs, et qui traitait de l’importation et de la culture des plus belles liliacées connues, finissait ainsi :

« Ayant eu l’avantage, selon moi, d’acquérir, d’élever et d’amener à parfaite éclosion le spécimin unique en France d’une liliacée qui surpasse en grandeur, en odeur et en esplendeur toutes les espèces su-mentionnées, j’appelle l’attention de l’honorable compagnie sur mon individu, et je l’invite à lui donner un nom. »

En achevant la lecture de son discours, M. Antoine enleva lestement, avec la pointe d’un roseau, le chapiteau de papier blanc, et Julien fit un cri de surprise en voyant l’Antonla Thierrii fraîche et fleurie dans toute sa gloire. Il crut d’abord à quelque supercherie, à une imitation artificielle parfaite ; mais la plante, débarrassée de son enveloppe, exhalait un parfum qui lui rappelait, ainsi qu’à Julie, le premier jour de leur passion, et, quand la clameur d’une sincère ou complaisante admiration eut fait le tour de la table, M. Antoine ajouta :

— Messieurs les savants, vous saurez que cette plante a poussé deux épis, le premier fin mai, assez joli, brisé par accident, et conservé en herbier ci-joint ; le second en août, deux fois plus grand et plus chargé que l’autre, et fleuri comme vous voyez le dixième jour dudit mois.

— Baptisons, baptisons ! s’écria madame d’Ancourt.