Page:Sand - Cadio.djvu/107

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qu’elle est allée trouver sous prétexte d’affaires de famille. Je ne suis pas dupe ! Elle ne l’aime pas, mais elle manque de courage, elle n’a pas eu confiance en moi. — Dites un mot, et je renonce à elle.

MARIE. Vous voulez un mot ?

SAINT-GUELTAS. Oui, un seul.

MARIE. Eh bien, le voilà, je vous méprise !

SAINT-GUELTAS. Pour oser me dire un pareil mot, il faut que vous n’ayez pas compris mon projet. Vous vous imaginez que je veux déserter ma cause, quand, pour la mieux servir, je me sépare de ceux qui la perdent ?

MARIE. Je ne juge pas votre politique, ce n’est pas la mienne, je ne m’intéresse pas à votre cause.

SAINT-GUELTAS. Que dites-vous là ? Vous devenez folle !

MARIE. Non, monsieur, je suis patriote, je n’ai jamais cessé de l’être. J’ai suivi mademoiselle de Sauvières par affection, et, si je vous témoigne du mépris, c’est parce que vous parlez de l’abandonner dans une situation affreuse, après avoir forcé son père à vous suivre. Cela est indigne de quelqu’un qui se pique d’être gentilhomme, et l’offre que vous me faites de trahir mon amie est une insulte gratuite dont la honte retombe sur vous seul.

SAINT-GUELTAS. Je m’attendais à votre réponse, elle est d’un esprit imbu de préjugés, mais généreux et fier. Je vous en aime davantage, et votre conquête, pour être difficile, ne me semble que plus désirable. Je vous ramènerai, mademoiselle Marie, et vous m’aimerez passionnément, si je vis assez pour cela. Sinon vous me pardonnerez comme on pardonne aux morts, et vous me regretterez un peu ! Voici votre amie, vous allez