ROXANE. Délivrons-le ! (Louise, émue, semble approuver sa tante. La Tessonnière donne des signes d’impatience quand elle se distrait de son jeu.)
LE COMTE. Le délivrer, pauvre enfant ! Tenter cela serait le sûr moyen de hâter sa mort. Ah ! les émigrés auront éternellement celle du roi sur la conscience !
ROXANE. Alors, vous ne voulez rien faire ? C’est plus commode, mais c’est lâche ! Ah ! ma nièce, si nous étions des hommes, souffririons-nous ce qui se passe ?
LE COMTE. Louise, réponds, mon enfant : que ferais-tu ? (Louise baisse la tête et ne répond pas.) Ton silence semble me condamner… Pourtant… tu sais que j’ai pris des engagements…
LOUISE, soupirant. Je sais, mon père !
LA TESSONNIÈRE, avec humeur. Eh ! vous mettez un valet sur un neuf, ça ne va pas. (Marie prend la place de Louise et continue la partie avec la Tessonnière.)
ROXANE, à son frère. Vos engagements, vos engagements ! Il ne fallait pas les prendre.
LE COMTE. Je les ai pris ; donc, ils existent. Vous-même m’avez approuvé quand j’ai juré de défendre notre district envers et contre tous, en acceptant le commandement de la garde nationale. (S’adressant à Louise.) Suis-je le seul qui ait agit de la sorte ? n’était-ce pas le mot d’ordre de notre parti ?
ROXANE. Le mot d’ordre, oui, à la condition de s’en moquer plus tard.
LE COMTE. Je n’ai pas accepté, moi, le sous-entendu de ce mot d’ordre.
ROXANE. Ah ! tenez ! si vous n’aviez pas fait vos preuves à l’armée du roi, du temps qu’il y avait un roi et une armée, je croirais que vous êtes un poltron !