LOUISE, qui s’est levée. Assez, assez ! partons ; mais il faut appeler…
SAINT-GUELTAS. Les autres, oui ! Raboisson est ici, il s’en charge ; venez, j’ai là une barque, nous les rejoindrons à un endroit convenu.
LOUISE. Mais… les paysans !… Mon Dieu, que va-t-on leur faire ? Avertissons-les.
SAINT-GUELTAS. Mademoiselle de Sauvières, les moments sont précieux. Si nous ne retrouvions pas votre père vivant, quels reproches n’auriez-vous pas à vous faire, vous ?
LOUISE. Mon pauvre père ! ah ! lui avant tout ; emmenez-moi, courons !
SAINT-GUELTAS. Venez ! (Ils vont pour sortir par le hangar.)
CADIO, qui s’est mis devant, les arrête. Non, il vous trompe, il ment ! votre père…
LOUISE. Est mort ?
CADIO. Non, émigré ! Il n’est pas où il vous dit.
SAINT-GUELTAS, mettant la main à sa ceinture. Comment le saurais-tu, imbécile ? (À Louise, bas.) Vous voyez bien, il est jaloux ! il va parler en maître. Remettez-le donc à sa place, ou je serai forcé…
LOUISE, lui retenant le bras. Non, non ! — Adieu, Cadio. J’emporte ton anneau d’argent, gage de ton dévouement et de ta soumission. (Montrant Saint-Gueltas.) Voici l’époux que j’avais choisi. Tu viendras nous voir quand nous serons mariés. Tiens, mon ami, voilà pour payer le voyage. (Elle lui donne une bourse et disparaît avec Saint-Gueltas, qui, en passant, fait un signe à Tirefeuille, caché dans les débris du hangar.)
CADIO, stupéfait. De l’argent ! de l’argent à Cadio pour payer son silence ! celui qu’on estimait, que l’on prétendait traiter en ami ! (Il jette la bourse vers le hangar. Tire-