Page:Sand - Cadio.djvu/323

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garde.) Il ne t’arrivera rien, à toi, Dieu merci !… Mais parlons d’autre chose ! attends d’abord ! (Il va à la porte de la cuisine.) Tu es là, Motus ?

MOTUS, approchant. Présent, mon capitaine.

CADIO. Fais seller mon cheval, je vais faire une reconnaissance.

HENRI. J’irai avec toi.

MOTUS. Le poulet d’Inde… pardon ! je veux dire le cheval du colonel sera prêt aussi dans cinq minutes. Il mange l’avoine. (Il sort.)

HENRI. Te voilà tout à coup très-ému ; qu’est-ce que tu as ?

CADIO. Rien ! Tu me raconteras tes campagnes, n’est-ce pas ? Ce doit être bien beau, de faire la guerre à de vrais soldats !

HENRI. Tu n’as pas voulu me suivre.

CADIO. Non ! ma place était ici. Les belles choses que tu as faites me consoleront de la triste besogne à laquelle je me suis voué.

HENRI. Mon cher ami, je crois que je ne pourrai pas te les raconter. Je les ai oubliées déjà en revoyant la femme que j’aime. C’est elle qui a fait mes prodiges de bravoure, son influence me soutenait dans une région d’enthousiasme où l’on peut accomplir l’impossible.

CADIO. Alors, tu as oublié… l’autre ? Cela m’étonne ; je ne croyais pas que l’on pût aimer deux fois.

HENRI. Aimer longtemps qui vous dédaigne, est-ce possible ? Ce serait de la folie !

CADIO. Mais l’amour n’est que folie…, à ce qu’on dit du moins !

HENRI. À ce qu’on dit ? Tu n’as donc pas encore aimé, toi ?