Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/157

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bonne dame comme vous, qui m’aurait prise avec elle, je serais plus heureuse, et, sans me vanter, pour coudre, ranger vos affaires, vous blanchir, vous servir et vous faire la conversation, j’aurais été bonne fille de chambre.

» — Ça pourra venir, lui ai-je répondu en riant : qui sait ? Si M. Gilbert vous renvoyait, je vous prendrais volontiers à mon service. »

Le mot renvoyer a frappé un peu plus fort que je ne l’eusse souhaité. Elle s’est récriée, et un instant j’ai cru que notre amitié allait se changer en aversion. Elle est violente, la chère petite ; mais j’ai su étouffer l’explosion en lui disant :

« — Je vois bien que vous n’êtes pas de ces personnes qu’on renvoie ; mais il y a manière d’éloigner les personnes fières : quelquefois un mot blessant suffit.

» — Vous avez raison ; mais jamais Paul ne me dira ce mot-là. Il a le cœur trop grand. Il n’aurait qu’une manière de me renvoyer, comme vous dites : c’est de me faire voir qu’il serait malheureux avec moi ; alors je n’attendrais pas mon congé, je le prendrais.

» — Et l’enfant, qu’en feriez-vous ?

» — Oh ! l’enfant, il ne voudrait pas me le laisser, il l’aime trop !

» — Est-ce qu’il l’a reconnu ?

» — Bien sûr qu’il l’a reconnu, même qu’il l’a fait inscrire fils de mère inconnue, afin que ma famille, qui est mauvaise, n’ait jamais de droits sur lui.

» — Alors vous n’en avez pas non plus sur votre enfant ?