Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/181

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de ma jalousie. Elle a ce grand avantage de ne pouvoir m’en inspirer aucune. Je suis sûr du présent. Le passé ne m’appartenant pas, je n’ai pas à en souffrir ni à le lui reprocher. L’homme qui l’a séduite n’existe plus pour elle ni pour moi : elle l’a anéanti à jamais en refusant ses secours et en voulant ignorer ce qu’il est devenu. Jamais ni elle ni moi n’en avons entendu parler. Il est probablement mort. Je peux donc parfaitement oublier que je ne suis pas son premier amour, puisque je suis certain d’être le dernier.

Quelques jours après cette conversation, je trouvai Marguerite très-joyeuse. Je n’avais pas grand plaisir à causer avec elle ; mais, comme je voyais toutes les semaines une vieille amie dans son voisinage, j’allais m’informer du petit Pierre en passant. Marguerite avait un gros lot de guipures à raccommoder, et je reconnus tout de suite un envoi de Césarine.

— C’est cette jolie dame, votre amie, qui m’a apporté ça, me dit-elle. Elle est venue ce matin, à pied, par le Luxembourg, suivie de son domestique à galons de soie. Elle est restée à causer avec moi pendant plus d’une heure. Elle m’a donné de bons conseils pour la santé du petit, qui souffre un peu de ses dents. Elle s’est informée de tout ce qui me regarde avec une bonté !… Voyez-vous, c’est un ange pour moi, et je l’aime tant que je me jetterais au feu pour elle. Elle n’a pas encore voulu me dire son nom ; est-ce que vous ne me le direz pas ?

— Non, puisqu’elle ne le veut pas.