Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/81

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

prétendant que je ne m’y connaissais pas, que je lisais cela comme un roman, que, quant à elle, elle n’avait jamais été dupe. Quand nous eûmes fini ces lettres, elle fit le mouvement de les jeter au feu avec les siennes ; mais elle se ravisa. Elle les réunit, les lia d’un ruban noir, et les mit au fond de son bureau en plaisantant sur ce deuil du premier amour qu’elle avait inspiré ; mais je vis une grosse larme de dépit rouler sur sa joue, et je pensai que tout n’était pas fini entre elle et M. de Rivonnière.

L’hiver s’écoula sans qu’il reparût. Dix autres aspirants se présentèrent. Il y en avait pour tous les goûts : variété d’âge, de rang, de caractère, de fortune et d’esprit. Aucun ne fut agréé, bien qu’aucun ne fût absolument découragé, Césarine voulait se constituer une cour ou plutôt un cortège, car elle n’admettait aucun hommage direct dans son intérieur. Elle aimait à se montrer en public avec ses adorateurs, à distance respectueuse ; elle se faisait beaucoup suivre, elle se laissait fort peu approcher.

Nous passâmes l’été à Mireval et aux bains de mer. Nous retrouvâmes là M. de Rivonnière, qui reprit sa chaîne comme s’il ne l’eût jamais brisée. Il me demanda si j’avais trahi le secret de sa confession.

— Non, lui dis-je, il n’était pas de nature à être trahi. Pourtant, si vous épousez Césarine, j’exige que vous vous confessiez à elle, car je ne veux pas être votre complice.

— Quoi s’écria-t-il, faudra-t-il que je raconte à une jeune fille dont la pureté m’est sacrée les vilaines