Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/236

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de jalousie dont elle était dupe, au point de ne plus savoir qui elle devait aimer, de Frumence ou de Marius. Je crois qu’elle s’arrangeait pour rêver de l’un et de l’autre, ce qui lui donnait des accès de gaieté nerveuse et folle où elle parlait et agissait comme une personne ivre. Quelquefois il s’amusait à la perdre dans la montagne, et il revenait me dire de ne pas l’attendre, parce qu’elle était retournée seule à Bellombre. Nous partions alors avec Michel, et Galathée retrouvait aux Pommets Frumence, très-surpris de la voir arriver. Il se doutait bien de quelque espièglerie de Marius ; mais il était loin de croire qu’il y fût mêlé. Alors il avait la bonté et la candeur de ramener mademoiselle Capeforte jusque chez nous, et elle était dans des transes mortelles de voir arriver Marius à sa rencontre avec des pistolets. Un jour, il lui envoya un gamin avec une lettre où il lui disait : Quand vous rentrerez, je ne serai plus qu’un cadavre !!! Elle crut à un suicide et arriva au pas de course. Marius s’était caché et se fit chercher pendant deux heures.

Rien ne détrompait cette pauvre sotte. Quand j’essayais de lui dire que Marius se moquait d’elle, elle me répondait que je l’aimais et que j’en étais jalouse. J’avoue qu’alors je la prenais en dédain profond et l’abandonnais à son persécuteur.