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XIV


Raoul Mahoult n’avait rien de perfide ou de mesquin dans le caractère. Il disait toute sa pensée, et il se sentait très-fort parce qu’il se sentait très-franc et foncièrement bon. C’était là tout le secret de son ascendant sur les femmes. Sa figure, régulière et douce d’expression, avait une fermeté de lignes qui révélait une énergie tranquille, et comme qui dirait tenue en réserve pour la véritable occasion. Beaucoup d’hommes étaient plus beaux, aucun plus sympathique aux honnêtes gens. Les fripons renonçaient vile à le tromper, les faibles se sentaient attirés sous sa protection, les indécis subissaient avec plaisir l’heureux prestige d’un esprit actif et lucide.

Il avait l’intelligence élevée, mais plutôt pratique que contemplative. Austère dans sa première jeunesse et fidèle par principe, il avait longtemps ignoré qu’il y eût au monde d’autres femmes que Constance, et même il avait surmonté héroïquement ses passions pendant les deux premières années de leur séparation.

Les voyages avaient modifié son organisation sans changer son caractère. Une santé énergique avait remplacé le tempérament un peu lymphatique de l’enfant de Paris. Il avait senti s’éveiller le besoin impérieux des émotions vives, et, perdant courage, il avait écrit à Constance : « Laissez-moi revenir, marions-nous, et je