dans cette maison où il me laissait libre et seule ? Ne serais-je pas à temps d’en sortir si je me sentais menacée de quelque outrage ?
« La vieille femme m’apporta à manger, et je lui demandai le nom de son maître.
« — Vous ne le connaissez donc pas ? répondit-elle ; il s’appelle Antonino.
« En même temps qu’elle me disait ce nom, le nom véritable du personnage me revint tout à coup, car je me souvenais fort bien de l’avoir aperçu quelquefois au théâtre ou à la promenade, et on l’avait nommé devant moi. C’était le comte***, un homme marié, un père de famille, fort estimé et fort riche.
« — Pourquoi me trompez-vous ? dis-je ingénument à la vieille ; je sais qui il est.
« — Je ne vous trompe pas, répondit-elle sans se déconcerter. Il s’appelle Antonino quand il vient ici. C’est un de ses petits noms, et, comme il aime à vivre seul de temps en temps, cette espèce d’incognito le dispense de recevoir des visites. C’est un homme un peu bizarre, assez mélancolique, mais très-doux et très-bon. Vous serez heureuse chez lui, soyez tranquille ! Le jardinier et moi avons ordre de vous obéir, et nous ne demandons pas mieux, ce qui vous prouve combien nous tenons à contenter notre maître.
« J’étais tout à fait rassurée. Je m’endormis jusqu’au matin.
« En m’éveillant dans cette chambre d’un luxe extraordinaire, la réflexion me revint : je fus surprise et