Page:Sand - Constance Verrier.djvu/60

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

effort que mon cerveau avait été forcé de faire pour passer du néant à la notion d’une connaissance quelconque. Mon vieux ami partageait cette conviction et m’exhortait à modérer mon zèle. Je demandais un médecin ; mais il me détournait de croire aux médecins, se disant plus instruit, plus logique et plus expérimenté que tous ceux du pays. Il s’occupait de chimie et me préparait lui-même des calmants qui m’avaient procuré tout d’abord un sommeil réparateur.

« Mais au bout de quelque temps, ce sommeil léger et agréable s’alourdit et devint si pénible que je refusai de recourir à la potion que la vieille Rita m’apportait tous les soirs. Elle mit alors tant d’insistance à me la faire prendre que je m’en étonnai, et comme j’avais quelque soupçon qu’elle me volait l’argent que me confiait son maître, je crus comprendre qu’elle cherchait à m’endormir pour pénétrer dans ma chambre impunément.

« J’avais l’habitude de m’enfermer au verrou et il me sembla que cette vigilance la contrariait. Soit que je me fusse embrouillée dans mes comptes, — je n’ai jamais pu apprendre à compter, — soit qu’elle eût soustrait réellement quelques pièces d’or pendant que j’étais au jardin, j’avais trouvé un déficit et j’en avais parlé au comte, qui n’avait pas voulu y faire attention. Il se disait sûr de cette vieille, et je n’avais pas cru devoir insister.

« Pourtant je m’inquiétai d’elle en songeant qu’elle pouvait vouloir doubler la dose de narcotique pour