Page:Sand - Constance Verrier.djvu/70

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le marchepied. Cette faveur me fut octroyée. Le cocher me prit à côté de lui et fouetta ses chevaux. Où allions-nous ? je n’en savais rien, mais nous tournions le dos à Gênes, et j’étais sauvée.

« Cette fois, je n’avais pas fait la folie de partir les mains vides. Je ne voulais plus être à la merci du premier passant que la faim me forcerait d’implorer. J’avais emporté cent livres sur trois mille dont ma bourse avait été garnie par le comte. J’étais vêtue très-simplement, mais assez chaudement pour supporter le voyage au grand air ; on était en plein janvier. Quand nous arrivâmes, vers minuit, à Chiavari, où les voyageurs devaient coucher, je me reconnus. Je payai le conducteur, et je m’enfuis pour échapper à ses questions et à ses offres de services.

« Il m’avait dit qu’il conduisait ses trois Anglais à Florence par Lucques. Je ne voulais pas traverser mon pays. Je m’enquis d’une diligence pour Sarzana. J’arrivai à temps, cette diligence partait. À Sarzana, je ne pris que le temps de manger, car j’étais à jeun depuis vingt-quatre heures, et je partis pour Parme, où je me reposai un jour sans me montrer. De là, je gagnai Vérone, où la destinée m’arrêta.

« Je m’étais demandé, en voyage, de quoi j’allais subsister quand j’aurais dépensé la misérable somme dont je ne m’étais pas munie à d’autre intention que celle de pouvoir fuir. Au milieu des rêves qu’il m’était permis de faire, celui de continuer l’étude de la musique dominait tous les autres. Mais il me fallait gagner