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consuelo.

combles il y avait un rebord festonné de plomb, une sorte de niche en plein air, où, derrière un large tuyau de cheminée, le maestro, par un caprice d’artiste, venait chaque soir regarder les étoiles, fuir ses semblables, et rêver à ses sujets sacrés ou dramatiques. Le hasard lui avait fait ainsi découvrir le mystère des amours d’Anzoleto, et Consuelo n’eut qu’à regarder dans la direction qu’il lui donnait, pour voir son amant auprès de sa rivale dans un voluptueux tête-à-tête. Elle se détourna aussitôt ; et le Porpora qui, dans la crainte de quelque vertige de désespoir, la tenait avec une force surhumaine, la ramena à l’étage inférieur et la fit entrer dans son cabinet, dont il ferma la porte et la fenêtre pour ensevelir dans le mystère l’explosion qu’il prévoyait.


XX.

Mais il n’y eut point d’explosion. Consuelo resta muette et atterrée. Le Porpora lui adressa la parole. Elle ne répondit pas, et lui fit signe de ne pas l’interroger ; puis elle se leva, alla boire, à grands verres, toute une carafe d’eau glacée qui était sur le clavecin, fit quelques tours dans la chambre, et revint s’asseoir en face de son maître sans dire une parole.

Le vieillard austère ne comprit pas la profondeur de sa souffrance.

« Eh bien, lui dit-il, t’avais-je trompée ? Que penses-tu faire maintenant ? »

Un frisson douloureux ébranla la statue ; et après avoir passé la main sur son front : « Je pense ne rien faire, dit-elle, avant d’avoir compris ce qui m’arrive.

— Et que te reste-t-il à comprendre ?

— Tout ! car je ne comprends rien ; et vous me voyez occupée à chercher la cause de mon malheur, sans rien