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consuelo.

mi-côte, la permission de monter le reste à pied. Il y consentit, et mettant pied à terre lui-même, il marcha auprès du cheval en sifflant.

Cet homme était trop bien habillé pour être un voiturier de profession. Dans un mouvement qu’il fit, Consuelo crut voir qu’il avait des pistolets à sa ceinture. Cette précaution dans un pays aussi désert que celui où ils se trouvaient, n’avait rien que de naturel ; et d’ailleurs la forme de la voiture, que Consuelo examina en marchant à côté de la roue, annonçait qu’elle portait des marchandises. Elle était trop profonde pour qu’il n’y eût pas, derrière la banquette du fond, une double caisse, comme celles où l’on met les valeurs et les dépêches. Cependant elle ne paraissait pas très-chargée, un seul cheval la traînait sans peine. Une observation qui frappa Consuelo bien davantage fut de voir son ombre s’allonger devant elle ; et, en se retournant, elle trouva le soleil tout à fait sorti de l’horizon au point opposé où elle eût dû le voir, si la voiture eût marché dans la direction de Passaw.

« De quel côté allons-nous donc ? demanda-t-elle au conducteur en se rapprochant de lui avec empressement : nous tournons le dos à l’Autriche.

— Oui, pour une demi-heure, répondit-il avec beaucoup de tranquillité ; nous revenons sur nos pas, parce que le pont de la rivière que nous avons à traverser est rompu, et qu’il nous faut faire un détour d’un demi-mille pour en retrouver un autre. »

Consuelo, un peu tranquillisée, remonta dans la voiture, échangea quelques paroles indifférentes avec M. Mayer, qui s’était éveillé, et qui se rendormit bientôt (Joseph ne s’était pas dérangé un moment de son somme), et l’on arriva au sommet de la côte. Consuelo vit se dérouler devant elle un long chemin escarpé et