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consuelo.

Consuelo, impatientée de cette feinte condescendance qui paraissait chercher à l’éblouir, ne put résister à l’envie de relever deux ou trois fautes qui se trouvaient dans un quatrain à la beauté. Sa mère lui avait appris à bien phraser et à bien énoncer les langues qu’elle-même chantait facilement et avec une certaine élégance. Consuelo, studieuse, et cherchant dans tout l’harmonie, la mesure et la netteté que lui suggérait son organisation musicale, avait trouvé dans les livres la clef et la règle de ces langues diverses. Elle avait surtout examiné avec soin la prosodie, en s’exerçant à traduire des poésies lyriques, et en ajustant des paroles étrangères sur des airs nationaux, pour se rendre compte du rhythme et de l’accent. Elle était ainsi parvenue à bien connaître les règles de la versification dans plusieurs langues, et il ne lui fut pas difficile de relever les erreurs du poëte morave.

Émerveillé de son savoir, mais ne pouvant se résoudre à douter du sien propre, Hoditz consulta le baron, qui se porta compétent pour donner gain de cause au petit musicien. De ce moment, le comte s’occupa d’elle exclusivement, mais sans paraître se douter de son âge véritable ni de son sexe. Il lui demanda seulement où il avait été élevé, pour savoir si bien les lois du Parnasse.

« À l’école gratuite des maîtrises de chant de Venise, répondit-elle laconiquement.

— Il paraît que les études de ce pays-là sont plus fortes que celles de l’Allemagne ; et votre camarade, où a-t-il étudié ?

— À la cathédrale de Vienne, répondit Joseph.

— Mes enfants, reprit le comte, je crois que vous avez tous deux beaucoup d’intelligence et d’aptitude. À notre premier gîte, je veux vous examiner sur la musique ; et si vous tenez ce que vos figures et vos manières promettent, je vous engage pour mon orchestre ou mon