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consuelo.

demain, dit enfin le Porpora d’une voix de tonnerre. Allons, point de grimaces, et que ce débat finisse. Voilà plus d’une heure que nous perdons à babiller. Monsieur le directeur, faites commencer les violons. Et toi, Bérénice, en scène ! Point de cahier ! à bas ce cahier ! Quand on a répété trois fois, on doit savoir tous les rôles par cœur. Je te dis que tu le sais ! »

No, tutto, o Berenice, chanta la Corilla, redevenue Ismène.

Tu non apri il tuo cor.

Et à présent, pensa cette fille, qui jugeait de l’orgueil de Consuelo par le sien propre, tout ce qu’elle sait de mes aventures lui paraîtra peu de chose.

Consuelo, dont le Porpora connaissait bien la prodigieuse mémoire et la victorieuse facilité, chanta effectivement le rôle, musique et paroles, sans la moindre hésitation. Madame Tesi fut si frappée de son jeu et de son chant, qu’elle se trouva beaucoup plus malade, et se fit remporter chez elle, après la répétition du premier acte. Le lendemain, il fallut que Consuelo eût préparé son costume, arrangé les traits de son rôle et repassé toute sa partie attentivement à cinq heures du soir. Elle eut un succès si complet que l’impératrice dit en sortant :

« Voilà une admirable jeune fille : il faut absolument que je la marie : j’y songerai. »

Dès le jour suivant, on commença à répéter la Zenobia de Métastase, musique de Predieri. La Corilla s’obstina encore à céder le premier rôle à Consuelo. Madame Holzbaüer fit, cette fois, le second ; et comme elle était meilleure musicienne que la Corilla, cet opéra fut beaucoup mieux étudié que l’autre. Le Métastase était ravi de voir sa muse, négligée et oubliée durant la guerre, reprendre faveur à la cour et faire fureur à Vienne. Il ne