Page:Sand - Contes d’une grand’mère, 1906.djvu/145

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fervent en Birmanie et ne vivait plus que de végétaux. Notre subsistance était assurée, et nous ne connaissions plus ni la souffrance ni la maladie.

» Mais le temps marchait, et Aor était devenu vieux. J’avais vu ses cheveux blanchir et ses forces décroître. Il me fit comprendre les effets de l’âge et m’annonça qu’il mourrait bientôt. Je prolongeai sa vie en lui épargnant toute fatigue et tout soin. Un moment vint où il ne put pourvoir à ses besoins, je lui apportais sa nourriture et je construisais ses abris. Il perdit la chaleur du sang, et, pour se réchauffer, il ne quittait plus le contact de mon corps. Un jour, il me pria de lui creuser une fosse parce qu’il se sentait mourir. J’obéis, il s’y coucha sur un lit d’herbages, enlaça ses bras autour de ma trompe et me dit adieu. Puis ses bras retombèrent, il resta immobile, et son corps de raidit.

» Il n’était plus. Je recouvris la fosse comme il me l’avait commandé, et je me couchai dessus. Avais-je bien compris la mort ? Je le pense, et pourtant je ne me demandai pas si la longévité