Page:Sand - Contes d’une grand’mère, 1906.djvu/63

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effrayante, était assise sur une grande chaise auprès du feu, ses mains desséchées collées sur les genoux. En reconnaissant Emmi, elle eut une expression de joie.

— Enfin, dit-elle, te voilà, et je peux mourir tranquille !

Elle leur expliqua qu’elle était paralytique et que ses voisines venaient la lever le matin, la coucher le soir et la faire manger à ses heures.

— Je ne manque de rien, ajouta-t-elle, mais j’ai un grand souci. C’est mon pauvre argent qui est là, sous cette pierre où je pose mes pieds. Cet argent, je le destine à Emmi, qui est un bon cœur et qui m’a sauvée de la prison au moment où je voulais le vendre à de mauvaises gens ; mais, sitôt que je serai morte, mes voisines fouilleront partout et trouveront mon trésor : c’est cela qui m’empêche de dormir et de me faire soigner convenablement. Il faut prendre cet argent, Emmi, et l’emporter loin d’ici. Si je meurs, garde-le, je te le donne ; ne te l’avais-je pas promis ? Si je reviens à la santé, tu me le rapporteras ; tu es honnête, je te connais. Il