Page:Sand - Contes d’une grand’mère, 1906.djvu/92

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

on ne m’avertit de rien. Un matin, je me trouvai seul avec le domestique, qui prit grand soin de moi, mais qui, préoccupé pour lui-même, ne s’efforça pas de me consoler, ou ne sut pas s’y prendre. Je tombai dans le désespoir, cette maison déserte par un froid rigoureux était pour moi comme un tombeau. Je n’ai jamais été gros mangeur, mais je perdis complètement l’appétit et je devins si maigre, que l’on eût pu voir à travers mes côtes. Enfin, après un temps qui me parut bien long, ma vieille maîtresse revint pour préparer le retour de la famille, et je ne compris pas pourquoi elle revenait seule ; je crus que son fils et les enfants ne reviendraient jamais, et je n’eus pas le courage de lui faire la moindre caresse. Elle fit allumer du feu dans sa chambre et m’appela en m’invitant à me chauffer ; puis elle se mit à écrire pour donner des ordres et j’entendis qu’elle disait en parlant de moi :

» — Vous ne l’avez donc pas nourri ? Il est d’une maigreur effrayante ; allez me chercher du pain et de la soupe.