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I


Lorsque j’habitais la charmante ville de Tarbes, je voyais toutes les semaines à ma porte un pauvre estropié appelé Miquelon, assis de côté sur un petit âne et suivi d’une femme et de trois enfants. Je leur donnais toujours quelque chose, et j’écoutais toujours sans impatience l’histoire lamentable que Miquelon récitait sous ma fenêtre, parce qu’elle se terminait invariablement par une métaphore assez frappante dans la bouche d’un mendiant. « Bonnes âmes, disait-il, assistez un pauvre homme qui a été un bon ouvrier et qui n’a pas mérité son malheur. J’avais une cabane et un bout de terre dans la montagne ; mais un jour que je travaillais de grand cœur, la montagne a croulé et m’a traité comme me voilà. Le géant s’est couché sur moi. »

La dernière année de mon séjour à Tarbes, je remarquai que, depuis plusieurs semaines, Miquelon n’était pas venu chercher son aumône, et je demandai s’il était malade ou mort. Personne n’en savait