Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/357

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drôlement les choses, tu as d’assez bonnes idées. Viens souper, tu es rentré tard, mais je t’ai attendu, et nous causerons encore avant de dormir.

Je ne savais plus où j’en étais, et je me sentais trop honteux pour rien dire. Avais-je rêvé, tout en revenant au gîte, que j’étais aux prises avec le géant, qu’une petite araignée m’avait parlé, que le géant m’avait fait ses conditions, et avais-je eu la sottise de raconter tout cela au père Bradat ? Ou bien toutes ces choses m’étaient-elles arrivées au coucher du soleil, et le géant, qui à coup sûr était magicien, m’avait-il transporté à la cabane Bradat sans que je me fusse aperçu de rien ?

Quand j’eus un peu mangé : — Qu’est-ce que nous disions donc tout à l’heure ? demandai-je au vieux berger.

— Voyons, tu t’endors ? répondit-il ; tu ne t’en souviens déjà plus ? Tu te fatigues trop après ce rocher. Tu es trop jeune pour faire tout seul un si gros ouvrage.

— Combien donc pensez-vous qu’il faudrait de monde pour en venir à bout ?

— Ça dépend du temps que tu voudrais y mettre. En deux saisons, je pense qu’une douzaine de bons ouvriers en viendraient à bout.

— Une douzaine ? Êtes-vous sûr ? Je pensais qu’à moi tout seul…

— Tu rêvais ! Il en faut bien douze, et en beaucoup d’endroits il faudra faire jouer la mine pour faire éclater les grosses roches.

— Faire jouer la mine ? m’écriai-je. Voilà une idée