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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

la preuve de mon mauvais cœur. Il se peut, mais je ne le savais pas ; qu’elle vous irrite et vous offense, au lieu de vous calmer, je vous en garderai votre part, et, pour vous la prouver, puisque c’est le moyen, je ne vous la témoignerai pas davantage. Sur ce, ô commandeur des non-croyants ! pardonnez-moi, ne me tuez pas en duel, et remettez dans votre poche un de vos sujets de chagrin les plus mal fondés. Charlotte, qui vous aime, a cru bien faire en vous parlant de moi. Elle s’est trompée, ne l’agitez pas avec cela. Je ne lui en parlerai seulement pas. Elle a eu de bonnes intentions ; car, elle, elle a un cœur affectueux, vous ne pouvez pas le nier.

Maurice vous remercie de votre bon souvenir. Nous travaillons et cultivons Euripide, Eschyle et Sophocle pour le quart d’heure, dans des traductions sans doute fort plates, mais qui nous laissent encore voir que ces gens-là avaient quelque talent pour leur temps, comme on dirait à la cour.

Moi, je m’occupe à avoir mal à la tête et aux yeux. Je ne sais si vous pourrez me lire. J’aurais mieux fait, pour ma santé, d’avoir le cœur de rocher dont vous me gratifiez, de vous laisser grogner tout votre saoûl, que de m’endommager le nerf optique à vous répondre si longuement.

Pardieu ! je suis bien bête, et je devrais avoir les profits de l’égoïsme, puisque j’en ai les honneurs.

Toute à vous.

G. S.