Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 2.djvu/319

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
316
CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

tiguée. Je le suis encore plus aujourd’hui et ne puis compléter ni éclaircir mon explication. Vous y suppléerez par votre vive intelligence ; ou bien mon projet vous paraîtra puéril, et, dans ce cas, n’y donnez aucune attention ; car il se peut qu’il n’entre en rien dans votre manière de sentir et de travailler.

Il y a eu un temps où mon idée sur la Chanson de tous les métiers était si nette et si vive, que, si j’avais su faire des vers, je l’aurais réalisée sous le feu de l’inspiration. Depuis, je l’ai souvent expliquée en courant et fait comprendre à des gens qui ne savaient pas ou qui ne voulaient pas s’en servir. Maintenant, elle s’est beaucoup effacée, surtout devant la crainte de vous indiquer une voie qui ne serait pas la vôtre et qui vous mènerait de travers. Et puis, je peux de moins en moins m’exprimer dans des lettres. J’ai tant de travail, d’ailleurs, que je ne puis écrire à mes amis que les jours où la maladie m’empêche d’écrire pour mon compte. Aussi je leur écris toujours fort obscurément et dans une grande défaillance d’esprit.

Dites à Désirée mille tendres bénédictions de ma part, pour elle et pour sa Solange, et de la part de ma Solange aussi. Mon fils est à Paris.

Vos vers sur la vérité et sur la réalité me semblent très beaux, très touchants et très bien faits, sauf deux ou trois. L’idée est bien soutenue, sauf deux ou trois strophes où elle languit et devient un peu vague. Mais elle se relève bien et la fin est très belle. Courage !