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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

nez-vous la vie de bohémien ? Faites-vous de jolis petits vers à Mathilde, à Clotilde, à Bathilde, à Ermenegilde ? Et votre lorgnon ? Faites-lui bien mes compliments. Et votre nez ? Envoyez-m’en une demi-aune pour une vingtaine de camards de ma connaissance.

Maurice vous adore. Solange vient d’être assez malade. Moi, je suis éreintée de travail. Le printemps est affreux ici. Le rossignol a chanté trois jours sous la neige. J’ai un cheval très gentil, arrivé du Nivernais et sur lequel je fais chaque jour un temps de galop. Voilà tout ce qui est survenu de neuf dans ma vie depuis que je ne vous ai vu.

Madame d’Agoult est à Paris et va revenir ici. Ma grue a un rhume de cerveau. J’ai apprivoisé un vanneau. Colette se porte bien. Le bonnet catalan, que vous m’avez rapporté de Marseille, a fait reculer d’épouvante le procureur du roi. Si on me poursuit pour m’être parée de ce symbole, je vous compromettrai de la belle manière. Je dirai, comme Meunier[1], que « vous m’avez payé des petits verres pour me porter à l’attentat ».

Bonsoir, mon bon vieux Graffiapione, Scipiocane. J’ai mal à la tête. Aimez-moi et ne gardez jamais rancune à ma paresse.

G. S.
  1. Fanatique qui, le 27 décembre 1836, avait attenté à la vie du roi Louis-Philippe.