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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

sieurs jours sans en rien faire. De sorte que j’ignore si, comme le Siècle, il ne se ravisera pas. J’ai écrit hier pour leur dire que, s’ils étaient effrayés de mes idées, je les autorisais à les supprimer entièrement, pourvu qu’ils publiassent ma traduction de votre lettre. Nous verrons s’ils auront un peu de cœur et de courage ; mais je suis honteuse pour la presse française non seulement que vous n’y ayez pas un défenseur spontané, mais encore qu’on ait tant de peine à laisser entendre une voix qui s’élève dans le désert pour dire que vous n’êtes ni un jacobin ni un impie.

Au reste, notre ami Borie, que vous avez vu chez moi, a pris plusieurs fragments de cette traduction et a fait de son côté un bon article qu’il a envoyé au Journal du Loiret, en même temps que j’envoyais le mien avec la traduction complète à Paris. Il a mieux réussi que moi. Cet article a été publié, il y a quelques jours, et j’attends, pour vous l’envoyer, que j’y puisse joindre le mien. J’ai vu aujourd’hui Leroux, à qui j’ai remis un exemplaire de votre texte italien, et qui va s’en occuper sérieusement dans la Revue sociale. Il ne sera pas autant que moi de votre avis. Il rendra justice à la pureté et à l’élévation de vos idées et de vos sentiments ; mais il est possédé aujourd’hui d’une rage de pacification, d’une horreur pour la guerre, qui va jusqu’à l’excès et que je ne saurais partager.

Blâmer la guerre dans la théorie de l’idéal, c’est tout simple ; mais il oublie que l’idéal est une conquête,