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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

l’ami d’autrefois. Je connais tous ces condamnés : il n’y en a pas un qui ne soit un honnête homme, incapable d’une mauvaise action, incapable de conspirer contre l’homme qui, en dépit des fureurs et des haines de son parti, leur aura rendu justice comme citoyen et leur aura fait grâce comme vainqueur.

Voyons, prince, le salut de quelques hommes obscurs, devenus inoffensifs ; le mécontentement d’un préfet de vingt-deux ans qui fait du zèle de novice et de six gros bourgeois tout au plus, pauvres mauvaises gens égarés, stupides, qui prétendent représenter la population, et que la population ne connaît seulement pas, ne sont-ce pas là de grands sacrifices à faire quand il s’agit pour vous d’une action bonne, juste et puissante ?

Prince, prince, écoutez la femme qui a des cheveux blancs et qui vous prie à genoux ; la femme cent fois calomniée, qui est toujours sortie pure, devant Dieu et devant les témoins de sa conduite, de toutes les épreuves de la vie, la femme qui n’abjure aucune de ses croyances et qui ne croit pas se parjurer en croyant en vous. Son opinion laissera peut-être une trace dans l’avenir.

Et vous aussi, vous serez calomnié ! et, que je vous survive ou non, vous aurez une voix, une seule voix peut-être dans le parti socialiste qui laissera sur vous le testament de sa pensée. Eh bien, donnez-moi de quoi me justifier auprès des miens, d’avoir eu espoir et confiance en votre âme. Donnez-moi des