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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

l’affirmer, est un artiste complet. Il goûte et comprend la musique d’une manière si supérieure, qu’il eût été très probablement un grand musicien, s’il n’eût pas choisi d’être un grand peintre. Il n’est pas moins bon juge en littérature, et peu d’esprits sont aussi ornés et aussi nets que le sien. Si son bras et sa vue venaient à se fatiguer, il pourrait encore dicter, dans une très belle forme, des pages qui manquent à l’histoire de l’art, et qui resteraient comme des archives à consulter pour tous les artistes de l’avenir.

Ne craignez pas d’être partial en lui portant une admiration sans réserve. La vôtre, comme la mienne, a dû commencer avec son talent, et grandir avec sa puissance année par année, œuvre par œuvre. La plupart de ceux qui lui contestaient sa gloire au début rendent aujourd’hui pleine justice à ses dernières peintures monumentales, et, comme de raison, les plus compétents sont ceux qui, de meilleur cœur et de meilleure grâce, le proclament vainqueur de tous les obstacles, comme son Apollon sur le char fulgurant de l’allégorie.

Vous me demandez, monsieur, de vous renseigner sur les peintures de ce grand maître qui sont en ma possession. Je possède, en effet, plusieurs pensées de ce rare et fécond génie.

Une Sainte Anne enseignant la Vierge enfant, qui a été faite chez moi à la campagne et exposée, l’année suivante (1845 ou 1846), au Musée. C’est un ouvrage important, d’une couleur superbe, et d’une composition sévère et naïve.