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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

pleines de choses à chaque ligne, et dont la forme un peu débarrassée du trop grand luxe d’épithètes qui en gênait autrefois l’allure, devient incisive, claire et frappante, sans cesser d’être d’un brillant à éblouir. Le dernier article, sur la Fille du millionnaire, m’a paru valoir un gros livre. Moi qui ne joue pas à la Bourse et qui ne fais pas de pièce, j’ai été aussi intéressée à votre démonstration que si j’étais l’auteur ou le millionnaire.

Déjà vous aviez émis des idées très lumineuses sur ce sujet à propos de la Bourse de Ponsard : vous voyez que je vous suis. Je ne connais pas assez le mécanisme de l’argent pour savoir si vous soutenez une thèse qui ne prête en rien à la réplique ; mais, telle qu’elle est, elle est d’une clarté, d’une vigueur qui mérite l’examen des esprits les plus sérieux et qui doit laisser une page importante dans l’histoire économique.

Quand vous touchez à l’histoire, du reste, sous quelque aspect que ce soit, vous esquissez et peignez de main de maître. Il y a là le grand dessin et la grande couleur. J’espère toujours que vous nous ferez un livre entier, un livre d’histoire ; il le faut ! nous n’avons plus de ces historiens qui étaient en même temps des modèles de forme et qui étaient aussi bien de grands poètes que d’utiles chroniqueurs. Il y a de très grands talents ; Louis Blanc est le plus beau de forme, parmi les jeunes. Mais on peut encore autrement, et vous montrez une individualité si belle,