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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

ment offert d’une façon honorable et équivalent au prix de l’Académie, dans le cas où il ne me serait pas accordé.

J’ai répondu que je ne désirais absolument rien ; mais j’ai bien chargé Buloz de présenter mon refus sous forme de remerciement très sincère et très reconnaissant ; or, comme une commission de cette nature, quelque explicite et franche qu’elle soit, peut, en passant par plusieurs bouches, être dénaturée, je vous demande de voir le prince, qui est net et vrai, lui, et de lui dire ceci : « Je ne mets aucune sotte fierté, aucun esprit de parti, aucune nuance d’ingratitude à refuser un bienfait de l’empereur. Si j’étais malade, infirme et dans la misère, je lui demanderais peut-être pour moi ce que j’ai plusieurs fois demandé à l’impératrice et aux ministres pour des malheureux. Mais je me porte bien, je travaille et je n’ai pas de besoins. Il ne me paraîtrait pas honnête d’accepter une générosité à laquelle de plus à plaindre ont des droits réels : si l’Académie me décerne le prix, je l’accepterai, non sans chagrin, mais pour ne pas me poser en fier-à-bras littéraire et pour laisser donner une consécration extérieure à la moralité de mes ouvrages prétendus immoraux. De cette façon, les généreuses intentions de l’empereur à mon égard seront remplies. Si, comme j’en suis bien sûre, je suis éliminée, je ne me regarderai pas comme frustrée d’une somme d’argent que je n’ai pas désirée et dont je suis toute dédommagée par l’intérêt que l’empereur veut bien me porter. » Voilà !