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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND


DXXXI

À M. LEBLOIS, PASTEUR, À STRASBOURG


Nohant, 3 août 1863.


Monsieur,

Vos excellents discours nous ont beaucoup frappés, mon fils, ma belle-fille et moi, et je vais tout de suite et sans préambule répondre à votre bonne lettre en vous parlant à cœur ouvert.

Mon fils s’est marié civilement l’année dernière. D’accord avec sa femme, son beau-père et moi, il n’a pas fait consacrer religieusement son mariage. L’Église catholique, dans laquelle nous sommes nés, professe des dogmes et les corrobore de doctrines antisociales et antihumaines qu’il nous est impossible d’admettre. Un cher petit garçon est né de cette union, il y a quinze jours. Depuis que sa mère l’a conçu et porté dans son sein, nous nous sommes demandé tous les trois s’il serait élevé dans les vagues aspirations religieuses qui peuvent suffire à l’âge de raison (à la condition de chercher la vérité dans des conceptions mieux définies), ou si nous essayerions, dans le but de le préparer à devenir un homme complet, de le rattacher à une foi idéaliste, sentimentale, et rationnelle. Mais où trouver cette foi assez formulée de nos jours pour être mise à la portée d’un enfant ?