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DCLXXXIX

À M. ARMAND BARBÈS, À LA HAYE


Nohant, 2 janvier 1869.


Cher grand ami,

Comme c’est bon à vous de ne pas m’oublier au nouvel an ! nos pensées se sont croisées ; car j’allais vous écrire aussi. Non, Aurore n’a pas de petit frère, il n’y a que deux fillettes : l’une de trois ans, l’autre de neuf à dix mois. Toutes deux ont été baptisées protestantes dernièrement ; c’est ce baptême qui a fait croire à l’arrivée d’un nouvel enfant. Ce frère viendra peut-être, mais il n’est pas sur le tapis. Quant au baptême protestant, ce n’est pas un engagement pris d’appartenir à une orthodoxie quelconque d’institution humaine. C’est, dans les idées de mon fils, une protestation contre le catholicisme, un divorce de famille avec l’Église, une rupture déterminée et déclarée avec le prêtre romain. Sa femme et lui se sont dit que nous pouvions tous mourir avant d’avoir fixé le sort de nos enfants, et qu’il fallait qu’ils fussent munis d’un sceau protecteur, autant que possible, contre la lâcheté humaine.

Moi, je ne voudrais dans l’avenir aucun culte protégé ni prohibé, la liberté de conscience absolue ; et,