Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 6.djvu/181

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honnête femme ne saurait pas jouer, me fait craindre qu’elle ne soit très rouée, et, quand elle secoue son mouchoir, ce qui est ingénieux au possible et doit faire beaucoup d’effet, je crains que ce ne soit inutile, et qu’elle ne fasse ensuite tout ce qu’elle s’est vantée d’avoir fait. C’était bien beau dans Madame Aubray, cette fille qui s’accuse à tort pour rendre le fils à sa mère. Ici, c’est dur et pas nécessaire. Ai-je tort ? ai-je raison ? Voilà mon impression.

Une situation si délicate ne pouvait être préparée, je le sais bien, sans être escomptée ; mais voilà où vous eussiez pu faire le tour de force, vous, à qui rien n’est impossible. Vous avez, je crois, sacrifié à l’effet un peu vite. Ce n’est pas moi qui vous dirai ce qu’il eût fallu faire. Je ne le sais pas, je vois bien la moralité : à quoi bon la faute ? la leçon est donnée ; mais la femme mérite-t-elle qu’on la lui donne et aura-t-elle le cœur et l’esprit d’en profiter ?

Voilà votre maman qui vous fait de la critique au coin de son feu. Si j’avais vu la pièce, il est plus que probable que j’aurais été trop saisie pour avoir une objection ; mais vos pièces, à vous, doivent triompher autant à la lecture que sur les planches. Vous y êtes obligé. Sur ce, je vous bige tendrement, et, si j’ai tort dans ce que je vous dis, n’en tenez compte et dites-moi que je me trompe. Je ne demande que ça.

Comme c’est joli, ce que Lebonnard dit au bébé et quel charmant et amusant dialogue d’un bout à l’autre.