prendre Dante et Beethoven. D’où j’ai conclu, en me disputant parfois avec de très grands esprits, que le talent impose des devoirs.
L’art pour l’art est un vain mot. L’art pour le vrai, l’art pour le beau et le bon, voilà la religion que je cherche, et, si je vous parle de moi, pour qui la célébrité est un martyre et la retraite un paradis, c’est pour vous dire que, ayant fait une belle chose, vous avez pour devoir de la publier, tout en la rendant accessible au vulgaire.
C’est mon plaidoyer. Vous jugerez dans votre propre cause, et laissez-moi vous dire encore qu’après avoir fait les concessions que j’ose vous conseiller, il n’est pas certain que votre œuvre ait le retentissement qu’elle mérite. Le succès tient à beaucoup de hasards ; mais, quand vous et moi aurons fait notre possible pour mettre à l’eau une barque bien gréée, qu’elle fasse un grand ou un petit voyage, notre conscience littéraire et philosophique sera tranquille.
Encore un mot, monsieur, car je sens que mon intervention est ici très délicate, vous dites : Si cette publication doit modifier en bien ma destinée… Et, ailleurs, vous me disiez : J’ignore absolument ces choses.
La publication d’un livre n’apporte que de très minimes résultats matériels à l’auteur. Il lui faut faire beaucoup de livres, en faire toute sa vie et qu’ils plaisent presque tous, pour qu’il en vive. Le retentissement d’un ouvrage nouveau si excellent ou si frappant