Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 6.djvu/314

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mon sujet. Je me demande pourquoi il n’en a jamais fait pour moi ; car, enfin, je ne suis pas plus journaliste que lui, et j’aurais plus besoin de son appui qu’il n’a besoin du mien.

En somme, les articles ne servent à rien, à présent, pas plus que les amis au théâtre. Je te l’ai dit, c’est la lutte d’un contre tous, et le mystère, s’il y en a un, c’est de provoquer un courant électrique. Le sujet importe donc beaucoup au théâtre. Dans un roman, on a le temps d’amener à soi le lecteur. Quelle différence ! Je ne dis pas comme toi qu’il n’y a rien de mystérieux ; si fait, c’est très mystérieux par un côté : c’est qu’on ne peut pas juger son effet d’avance, et que les plus malins se trompent dix fois sur quinze. Tu dis toi-même que tu t’es trompé. Je travaille en ce moment à une pièce, il m’est impossible de savoir si je ne me trompe pas. Et quand le saurai-je ? Le lendemain de la première représentation, si je la fais représenter, ce qui n’est pas sûr. Il n’y a d’amusant que le travail qui n’a encore été lu à personne. Tout le reste est corvée et métier, chose horrible !

Moque-toi donc de tous ces potins ; les plus coupables sont ceux qui te les rapportent. Je trouve bien étrange qu’on dise tant contre toi à tes amis. On ne me dit jamais rien de tel, à moi : on sait que je ne le laisserais pas dire. Sois vaillant et content, puisque Saint Antoine va bien et se vend supérieurement. Que l’on t’éreinte dans tel ou tel journal, qu’est-ce que ça fait ? Jadis, ça faisait quelque chose ; à présent, rien. Le pu-