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CMXVIII

À M. HENRI AMIC, À PARIS


Nohant, 22 octobre 1874.


Cher enfant,

De quoi me remerciez-vous ? de vous avoir aimé à première vue et même auparavant d’après vos lettres ? Est-ce que ce n’est pas tout simple, puisque vous m’exprimiez une confiance sincère ? Il est tout simple aussi que, recevant des milliers de lettres, j’aie appris à discerner le bon grain de toutes les mauvaises herbes et à ne point perdre mon temps à de stériles relations ; c’est pourquoi il m’en reste pour les bonnes. Je pourrais donc dire, comme vous, que je suis égoïste et que j’agis dans mon intérêt.

Croyez bien que je ne vous ai rien donné qui ne fût déjà en vous. Tout le bonheur de la chose, c’est que j’aie trouvé la forme qui fait voir clair en soi-même. Je ne suis qu’une petite lampe pour aider la marche de celui qui est déjà en route pour le pays de vérité. Dieu vous a donné aussi une bonne dose de clarté intérieure qui n’avait pas besoin de la mienne ; mais vous l’aimez parce qu’elle se trouve appropriée à votre vue. En cherchant bien, nous découvririons que je ne suis qu’une paire de lunettes qui ne fera