vec la poste, n’étant pas arrivée plus vite à la Châtre.
Plauchut m’écrit que Paris est rugissant d’enthousiasme. Ce n’est pas la même chose en province. On est consterné ; on ne prend pas le change, on voit là, non point une question d’honneur national, mais un sot et odieux besoin d’essayer les fusils, un jeu de princes ! Les familles tremblent pour leurs enfants, et les jeunes gens ne sont pas soutenus par l’enthousiasme de la patrie en danger.
Chanter la Marseillaise sur l’air de l’Empire nous paraît un sacrilège. Enfin, nous verrons bien ; mais j’augure très mal du drame qui se prépare et j’y vois tout le contraire d’un pas vers le progrès. Si les paysans, qui ne peuvent plus nourrir leurs bestiaux, les vendent avec profit pour l’armée, ils trouveront que c’est pour le mieux, sans songer à ce qu’ils restitueront à l’État en impôts d’argent et de sang.
Je suis très triste, et, cette fois, mon vieux patriotisme, ma passion pour le tambour ne se réveillent pas. Les républicains, qui font faute sur faute, ont poussé le gouvernement à un excès de susceptibilité qui fait bien son affaire et nullement la leur. Tout le monde devient fou. Il faut en prendre son parti et avaler la décadence jusqu’à la lie. Quand la coupe sera desséchée, elle se remplira d’un vin nouveau, je n’en doute pas ; je ne doute pas de l’avenir, mais le présent est fort laid, et il faut du courage pour le subir sans blasphémer.
Comme vous êtes peu restés, chers amis ! on s’est