Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 6.djvu/60

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pas en France cet allègement à nos peines, nous sommes entre l’oppression étrangère et la dictature au dedans. Dictature inévitable aujourd’hui, mais que la réunion d’une constituante en temps utile eût pu rendre légale jusqu’à un certain point et par conséquent moins rigoureuse.

Mais qui sait ce qu’eût produit cette assemblée ? Les représentants improvisés de la République ont-ils cru fermement qu’elle seule pouvait sauver le pays ? Ils ont bien pu se tromper, on n’aime pas les opinions imposées et on serait plus patriote si on n’était pas forcé à l’être. Seulement je ne crois pas qu’ils aient assumé cette tâche et cette responsabilité pour satisfaire leur ambition ; ce serait un trop mauvais calcul. Ils seront emportés avec perte par le premier suffrage universel qui pourra fonctionner. Au lendemain de Sedan, ils eussent eu des chances ; à présent, après ce qu’on a souffert, la multitude, gouvernée par les intérêts, les maudira, quelle que soit l’issue de la guerre. Elle croira toujours qu’on pouvait l’éviter ou la faire mieux. — Qui prononcera ?

Là où nous sommes, il nous est impossible de juger, et il faudra le temps d’une longue et difficile enquête pour porter un jugement vraiment historique sur ces marches et contremarches, sur ces ordres bien ou mal donnés, sur ces mesures utiles ou fatales. Chaque localité aura son histoire, chaque combat sa chronique particulière ; sur plusieurs points, il y a héroïsme ; sur les autres, mystère et confusion. Le Français est