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Et on le repousse dans la rue.

Il rentre au café, prend une plume qu’il met en travers dans sa bouche, s’empare d’une feuille de papier, et, avec l’allure délibérée et pressée d’un garçon de bureau attardé, il pousse, il culbute tout en criant : « Gare ! gare donc ! » et il entre dans la salle du conseil.

— Par où es-tu entré ? s’écrie un des membres stupéfait.

— Par la porte, citoyens !

— La consigne était de ne pas te laisser revenir.

— J’avais votre parole, j’étais sûr que vous me recevriez.

On sourit, on l’écoute encore, tous signent le sauf-conduit. Il lui est permis de conduire son frère au château de Navarre ; il remercie avec effusion. Il retourne au café, car il est très-nerveux et il sent que la tête lui tourne. Il paie sa dépense, se sent défaillir, se ranime et court à l’hôtel de Bouillon pour dire à son frère :

— J’ai tenu ma parole, je t’ai sauvé. Ta mère est contente de moi. En route pour Navarre !

Mais, pour être à Navarre, était-on sauvé ?