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liers de siècles, pour que ces masses soient arrivées par la pratique à ne plus douter de votre infaillibilité scientifique, car il aura fallu tout ce temps-là pour vous la faire acquérir à vous-mêmes. Nous voici donc lancés dans des guerres atroces où vous régnerez par la terreur, et votre science de destruction augmentant toujours, chaque nouvelle guerre sera plus meurtrière que les autres, jusqu’à ce que vous restiez seuls en face de vos instruments formidables, n’ayant plus d’autre ressource que de faire sauter la planète pour en finir. Voilà un petit rêve qui n’est pas gai, et que vos amis ont eu raison de traiter d’affreux cauchemar.

Le pouvoir absolu qui s’appuierait sur la science du fait serait le pire de tous, parce qu’il détruirait l’amour de la liberté qui commence à nous venir et dont nous n’avons pas abusé jusqu’ici. Il nous rejetterait dans la barbarie des superstitions. Les hommes ne se laissent pas convaincre malgré eux. L’évidence n’a pas d’empire sur celui à qui on ôte le choix entre le vrai et le faux. Être libre, c’est la première condition pour voir clair. Laissez la foudre aux mains du vieux Zens. Au moins celui-là ne savait pas s’en