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lat. L’esprit de jadis était trop léger sans doute, puisque l’art du causeur était d’effleurer sans approfondir, mais l’esprit d’aujourd’hui est tombé dans l’excès contraire. Il est lourd comme le pas de l’éléphant ou menaçant comme celui du cheval de bataille. Tout ce que l’on évitait autrefois pour maintenir la bonne harmonie, on se le jette à la tête à présent avec une âpreté grossière. C’est que nous sommes une race d’artistes, et que, quand notre cerveau n’est pas rempli de la recherche d’un idéal, beau ou joli, gai ou dramatique, il s’emballe dans le noir, l’incongru, le bête ou le laid. Voilà pourquoi je prêche le plaisir aux gens de ma race ; oui, le plaisir ; tous les hommes y ont droit et tous les hommes en ont besoin : le plaisir honnête, désintéressé en ce sens qu’il doit être une communion des intelligences ; le plaisir vrai avec son sens naïf et sympathique, son modeste enseignement caché sous le rire ou la fantaisie. Toutes les autres occupations utiles de l’esprit sont plus sérieuses et s’appellent étude, recherche, travail, production. Les grands divertissements publics sont émouvants ou fatigants. L’amusement proprement dit est pour chacun de nous un joli