la chercher à Orléans ; elle était retenue d’avance.
— Ah ! c’est possible. Il n’a dit à personne qui elle était et d’où elle sortait ; même cela inquiétait madame, et tout le monde était étonné autant qu’on peut l’être d’une bizarrerie de M. le comte, qui ne fait rien comme les autres… Tant il y a qu’elle a été à la prairie jusqu’à la cabane des cygnes, comme si cela pouvait intéresser un pauvre petit dont les yeux ne sont pas encore ouverts ! Sans doute qu’elle n’avait jamais vu de cygnes et qu’elle a cédé à une stupide curiosité ; elle y a été et elle n’en est pas revenue. On a vu la trace de ses pieds sur le sable, on l’appelait, on la cherchait partout, quand un jardinier a rapporté son châle et le petit bonnet de l’enfant que l’eau roulait sur le sable de l’allée. On a couru partout ; je crois que, pendant huit jours et huit nuits, on ne s’est pas arrêté un instant. M. le comte ne rentrait plus ; il allait partout, tantôt avec Joseph, le plus souvent seul, à cheval ou à pied ; sa figure restait tranquille, il n’ouvrait la bouche que pour donner des ordres. Il n’espérait rien, il voulait retrouver le corps ; il a fallu y renoncer. Quand quelqu’un se hasardait à lui marquer du chagrin ou de l’intérêt, il disait d’un ton brusque :
» — Ne me parlez pas.
» Quant à madame, elle nous accablait de questions et nous demandait son enfant d’une voix déchirante. On lui a fait croire qu’il ne fallait pas qu’il vînt dans sa chambre pendant qu’elle se-