Page:Sand - Flamarande.djvu/233

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— Pourquoi aurait-on dit cela ? Est-ce que vous êtes capable d’une mauvaise action ou d’un mauvais sentiment ? Je ne le crois pas, moi.

— N’a-t-on pas dit à madame que je m’étais prêté à l’enlèvement… ?

J’allais droit au fait, je m’y sentais entraîné par une force irrésistible ; j’allais me confesser, mais non plus avec l’humilité du repentir ; j’allais avouer ma culpabilité pour lui faire entendre que je connaissais la sienne. Elle ne me donna pas le temps de parler. Elle se leva brusquement en me disant d’une voix émue, mais non irritée :

— Ne me parlez pas de cela, Charles ! je vous en prie, et au besoin je vous le défends. Sévines m’a été fatal, j’y ai perdu mon enfant, et j’ai failli y perdre la raison. Vous m’avez plainte, je le sais, vous trouviez M. le comte trop sévère ; mais moi, je ne me plains pas. Il m’a rendu service en m’empêchant de nourrir une illusion et en ne me cachant plus la mort tragique de mon pauvre enfant. À présent, je suis résignée, et, ainsi que mon mari me l’a prescrit, je supporte mon malheur avec dignité. Ne me rappelez donc pas ces déchirements, si, comme je le crois, vous m’êtes attaché. Restez chez nous et croyez que vous pouvez contribuer à ma consolation en soignant, en aimant Roger comme vous le faites. Ah ! je devine maintenant pourquoi vous avez cette crainte de m’avoir déplu ! Je vous ai reproché dernièrement de le gâter ; je ne vous