Page:Sand - Flamarande.djvu/50

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— Non, je n’ai pas ce droit-là, je vous le demande.

— Monsieur le comte sait bien que je n’ai rien à lui refuser.

Je m’installai dans ma fonction temporaire, et dès lors je pénétrai dans mon Salcède comme avec une lame d’épée. Il ne pensait pas plus à épouser la baronne qu’à s’aller noyer ; mais il était un peu plus habile que je ne l’aurais cru. Il la ménageait sans doute pour écarter les soupçons. Il la comblait de soins et se montrait plus occupé d’elle que de la comtesse. Il était avec elle sur le pied d’une amitié délicate, dévouée, et il ne lui faisait pas la cour ; mais il était si parfait pour elle, pour son fils que, sans être sotte, elle pouvait bien s’y méprendre.

Encore moins il faisait la cour à madame de Flamarande. Il se tenait à distance respectueuse, et c’était elle qui paraissait vouloir l’apprivoiser, ainsi que l’en avait chargée son mari. Elle n’y mettait aucune coquetterie, elle n’en avait pas ; mais, avec son grand air de candeur et de désintéressement, elle lui plaidait sans cesse la cause de l’amour et paraissait ainsi servir les secrets desseins de son amie. Il se laissait volontiers endoctriner et ne donnait la réplique que pour la forcer de continuer son joli prêche.

Je découvris, en l’écoutant, qu’elle avait autant d’esprit que de beauté, et que, si elle ne le faisait pas exprès, elle n’en agissait pas moins de ma-