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Adieu, ma bonne mère, je t’embrasse de toute mon âme, de tout mon cœur, de toutes mes forces, de tout mon amour pour toi.

Maurice.


LETTRE VI

24 floréal.

J’avais bien besoin, ma bonne mère, de recevoir une lettre de toi. Ce bonheur m’a paru encore bien plus grand par la privation que j’en avais éprouvée. J’espère que ce sera la seule atteinte que notre correspondance essuiera, ou plutôt j’espère qu’elle finira bientôt, et que je pourrai te dire, de vive voix, tout ce que je sens pour toi. Voilà comment on n’est jamais content ! Lorsque j’étais privé de l’écrire, je n’aspirais qu’après le moment oïl cette liberté me serait rendue ; maintenant j’en jouis, et cela ne fait qu’augmenter le désir que j’ai d’être réuni à toi.

On dit qu’on n’a pris toutes ces mesures que pour ensuite mettre les commissions en activité. J’ignore comment tout cela s’arrangera ; mais la justice ne peut manquer de régner dans les arrêts rendus par des magistrats intègres.

J’ai vu, ce matin, le citoyen Beaumont[1], ainsi que mon ami de la montagne. Nous nous sommes longtemps promenés, et je n’ai pas besoin de te dire de qui nous parlions. Si les oreilles ne t’ont pas tinté tout ce temps-là, c’est que le proverbe est menteur.

Je reconduis ceux qui viennent me voir jusqu’à la barrière, et je l’assure que je trouve bien étrange

  1. L’abbé de Beaumont, son oncle, fils du duc de Bouillon et de mademoiselle Verrières.