Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 10a13 1855 Gerhard.djvu/127

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donné l’exemple de ce secret héroïsme qui n’avait que Dieu pour confident des protestations de la dignité méconnue ?

Que la femme soit différente de l’homme, que le cœur et l’esprit aient un sexe, je n’en doute pas. Le contraire fera toujours exception même en supposant que notre éducation fasse les progrès nécessaires (je ne la voudrais pas semblable à celle des hommes), la femme sera toujours plus artiste et plus poète dans sa vie, l’homme le sera toujours plus dans son œuvre. Mais cette différence, essentielle pour l’harmonie des choses et pour les charmes les plus élevés de l’amour, doit-elle constituer une infériorité morale ? Je ne parle pas ici socialisme : au temps où cette question fondamentale commença à me préoccuper, je ne savais ce que c’était que le socialisme. Je dirai plus tard en quoi et pourquoi mon esprit s’est refusé à le suivre sur la voie de prétendu affranchissement où certaines opinions ont fait dévier, selon moi, la théorie des véritables instincts et des nobles destinées de la femme : mais je philosophais dans le secret de ma pensée, et je ne voyais pas que la vraie philosophie fût trop grande dame pour nous admettre à l’égalité dans son estime, comme le vrai Dieu nous y admet dans les promesses du ciel.

J’allais donc nourrissant le rêve des mâles vertus auxquelles les femmes peuvent s’élever, et à toute heure j’interrogeais mon âme avec une